Panneau pompéïen (pour être appliqué en camée) pour la Sala de Baile de la Real Casa del Labrador d'Aranjuez

Panneau pompéïen (pour être appliqué en camée) pour la Sala de Baile de la Real Casa del Labrador d'Aranjuez

Description

Le panneau, avec cinq autres (inv. MT 3063.2 à MT 3063.6) a été acquis par le jeune musée d'Art et d'Industrie de Lyon (ancêtre du musée des Tissus) avec la collection remarquable de François Bert, professeur de théorie, en 1862. L'ensemble est décrit dans l'inventaire manuscrit de cette collection : « 3063. Satin lancé, dessin de style étrusque. Bacchanale. Les figures se détachent en rouge brique sur un fond noir. Fabrication lyonnaise. Com(mencemen)t du XIXe siècle. Divisé en six panneaux numérotés de 1 à 6. » Ils présentent six figures de satyres dansants, le premier, de profil, tourné vers la droite, soufflant par ailleurs dans une flûte. Ces panneaux, destinés à être appliqués en camée sur des panneaux de tenture, ont exécutés par Camille Pernon sur des dessins de Jean-Démosthène Dugourc pour le Salón Principal ou Sala de Baile de la Real Casa del Labrador à Aranjuez. Le roi Charles IV s'attacha tout particulièrement à la décoration de cette résidence et de ses trois niveaux, dont premier et mansardes furent pourvues de soieries, tant lyonnaises qu'espagnoles. Une facture établie à Lyon le 31 octobre 1797 pour plusieurs tissus destinés aux maisons de campagne de Sa Majesté, parmi lesquels se trouvaient des étoffes jaunes et bleues de goût étrusque, permet de dater précisément les décors encore en place dans la Sala de Baile, les grands panneaux sur fond jaune avec camées appliqués par broderie, ocre sur fond noir, représentant Jupiter et Junon en trône, des ménades et des satyres dansants et des Amours. Les modèles gravés utilisés pour ces camées figurent dans l'ouvrage d'Ottavio Antonio Bayardi, Le Antichità di Ercolano Esposte, publié en huit tomes à Naples, entre 1757 et 1792, d'après les découvertes faites sur le site d'Herculanum. Pour l'ensemble du décor textile de cette Sala de Baile, Camille Pernon collabora avec Claudio (Claude) Bodoy, français qui établit la Real Fábrica de Tejidos à Valence, à la tête de la manufacture Bodoy et Labat. Ce dernier présentait, en effet, le 31 juillet 1799, une autre facture correspondant à des soieries de description semblable, destinées à la Casa del Labrador de Aranjuez. De cette commande, le musée des Tissus conserve, outre les six panneaux à satyres dansants, un autre panneau pompéïen (pour être découpé et appliqué en camée) représentant Jupiter (inv. MT 24582.2), sur fond jaspé bleu, et une laize (elle aussi pour etre découpée) avec des danseuses pompéïennes (inv. MT 24804). Les caractéristiques techniques des panneaux avec les satyres et des autres éléments du décor d'application sont identiques : dans tous les cas, il s'agit d'un lampas fond satin de 8, chaîne (décochement 5), 1 lat de liseré lié en taffetas. Les étoffes comportent des chaînes (comptant chaque fois 8 fils pièce, 1 fil de liage) en soie, organsin S de 2 bouts (pièce : bleu clair jaspé à la flotte pour Jupiter, noire pour les autres ; liage : blanche pour Jupiter, saumon pour les autres ; découpure : 8 fils pièce ; réduction : 142-148 fils pièce, 17-18 fils de liage par centimètre). Les trames, qui travaillent par un coup du premier lat (fond), un coup du second lat liseré, sont en soie, assemblé faible S pour le fond (bleu ou noir) et assemblé sans torsion apparente ou faible S (blanc ou saumon ; découpure : 1 passée ; réduction : 26 passées par centimètre). Le décor est réalisé par la trame liserée second lat liée en taffetas par la chaîne de liage et qui repose sur la moitié du satin de 8, chaîne pièce et trame de fond premier lat. Lorsque la trame liserée n'est plus utilisée pour le décor, elle retrouve sa place dans le fond satin de 8. Les lisières, quand elles sont conservées, présentent des cordelines (6 ou 8) en cordonnet de soie S de deux bouts crème, puis tissées en gros de Tours à fils multiples et natté ou cannelé. Dans la Sala del Torre de la Casita del Principe de l'Escurial, d'autres étoffes de Camille Pernon avec danseuses de type pompéïen et Amours ont été rapportés par broderie sur les étoffes garnissant les sièges. Les médaillons avec les Amours sont tissés sur fond bleu, comme en témoigne, par exemple, l'exemplaire conservé au musée des Tissus (inv. 24801), alors que les danseuses sont sur fond noir, comme à la Sala de Baile de la Real Casa del Labrador.  Le musée des Tissus conserve deux autres versions de ménades dansant créées pour Charles IV d'Espagne (inv. MT 25729 et MT 27862) ; le Victoria & Albert Museum, à Londres, trois panneaux en frise avec les figures de ménades (inv. 1274B-1871) ; la Fondation Abegg, à Riggisberg, un panneau de lampas fond satin, liseré, à décor étrusque écru sur fond bleu jaspé, avec des camées appliqués représentant des Amours dans des médaillons et des ménades dans des tableaux octogonaux (inv. Nr. 4938). Maximilien Durand